Suspension de  la couverture médiatique des activités des partis  au Burkina: une loi de 90 jours qui suscite déjà regrets et indignations 

Billet

Le Conseil National de la transition(CNT) du Burkina Faso est à sa deuxième loi qui déclenche un tollé après la première portant sur le code électoral. En effet, la loi portant réglementation de la précampagne électorale sur une période de 3 mois (21 juin au 18 septembre 2015), se heurte déjà à des incompréhensions et controverses sur son opportunité et sa durée jugée longue par d’aucuns. Les petits partis estiment que cette loi est profitable seulement pour les grands partis. La raison, c’est qu’en 21 jours de campagne électorale officielle, les petits partis et candidats indépendants n’auront pas suffisamment de temps pour se faire connaître du grand public ,surtout ceux qui n’ont pas investi très tôt leurs candidats à la présidentielle et arrêté leurs listes définitives de postulants aux législatives pour ces deux élections couplées le 11 octobre 2015.Paradoxalement,des partis considérés comme grands ne sont pas contents du sevrage médiatique brusque que la loi du CNT leur impose 90 jours durant. Au sein même des députés du CNT, des voix s’élèvent en sourdine pour signifier qu’on n’a pas su mesurer au préalable l’impact réel de la loi sur la vie des partis politiques. La loi sur la précampagne  qui interdit la couverture médiatique des activités des partis politiques qualifiées de campagne déguisée ainsi que l’usage des gadgets publicitaires (affiches, T-shirts etc..) pendant 90 jours a été essentiellement motivée par des acteurs de la société civile qui font une immixtion dans la politique sans en maitriser les réalités pratiques. On ne pourra pas mettre la police à la poursuite des citoyens qui ont reçu des T-shirts et pagnes à l’effigie des partis et candidats avant la période d’entrée en vigueur de la loi de 90 jours et qui continuent de les porter allègrement en faisant non pas une campagne déguisée mais une véritable campagne à ciel ouvert. Il ressort que la loi a été votée comme un produit brut sans suffisamment de clarification du contenu. Le Conseil Supérieur de la Communication(CSC) chargé de l’application de la loi auprès des médias a dû se battre comme un beau diable, voire comme un avocat du diable pour rédiger 14 articles qui précisent ce qui est autorisé et interdit durant les 90 jours d’embargo politico-médiatique. C’est pourquoi le CSC a fait une dérogation à la loi, en permettant aux médias de couvrir les investitures des candidats à la présidentielle 2015 et de publier les avis et communiqués des partis exceptionnellement. Lors des échanges entre le CSC et des rédacteurs en chef d’organes de presse le 26 juin 2015, des suggestions ont été faites dans l’optique d’améliorer la loi sur la précampagne. Ainsi, des propositions ont été faites de s’inspirer de l’exemple de la transition nigérienne où des quotas (1 ou 2 activités par mois) pouvaient faire l’objet de couverture médiatique pendant la précampagne. Des voix s’élèvent également pour une réduction de la durée de la précampagne en la ramenant de 3 à 1 mois.

Visiblement, la tradition au Burkina de voter des lois rapidement pour des objectifs politiques visés sans en mesurer au préalable l’impact réel dans l’application n’a pas changé. Ainsi, la constitution, le code électoral ont été modifiés à souhait sous le régime de la 4è république. Si on n’y prend garde, le risque est grand de modifier précipitamment la constitution par le régime de la transition avec des points non consensuels qui nécessiteront plus tard une autre relecture.

Bérenger Traoré

Agence de Presse Labor              30 juin 2015

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