Les députés français ont entamé l'examen de la loi prévoyant la possibilité de divorcer par consentement mutuel sans passage devant le juge. Rubberball/Mike Kemp (Getty Images)

Le divorce sans juge divise les professionnels du droit en France

Les députés français ont engagé l’examen de deux projets de loi visant à réformer la justice afin de l’adapter aux exigences du XXIe siècle. Cette réforme prévoit notamment l’instauration du divorce par consentement mutuel sans passage devant le juge. Une petite révolution puisqu’aujourd’hui il est impossible pour les couples mariés de se passer de la justice s’ils souhaitent se désunir.

C’est un véritable bouleversement administratif et judiciaire qui pourrait intervenir pour des dizaines de milliers de Français : la possibilité de pouvoir divorcer en un temps record en passant uniquement chez le notaire, et non plus chez le juge.

Il existe actuellement quatre procédures distinctes pour divorcer et toutes sont précédées d’une conciliation obligatoire chez le juge. Pas moyen de se soustraire à la justice. Il y a d’abord la procédure par consentement mutuel qui est donc amenée à être modifiée par la loi.

Les trois autres procédures, elles, ne sont pas concernées par la réforme: il y a le divorce pour faute, le divorce accepté (le couple est d’accord pour divorcer mais ne s’entend pas sur les conséquences de la séparation), et enfin 4e procédure, le divorce pour altération définitive du lien conjugal, qui permet de se séparer même lorsque l’un des conjoints s’y oppose.

Plus de 120 000 divorces par an

Mais la procédure la plus répandue, c’est bien entendu le divorce par consentement mutuel. Sur les 120 000 couples mariés qui se séparent chaque année en France, plus de la moitié d’entre eux le font par consentement mutuel.

Le garde des Sceaux, Jean-Jacques Urvoas, plaide aujourd’hui pour plus de pragmatisme. Et le ministre de la Justice s’appuie sur un chiffre : il note que dans 99,9% des cas les juges ont simplement homologué le travail des avocats. On peut donc supprimer cette étape, dit encore le garde des Sceaux.

Sa réforme propose donc que chaque conjoint ait un avocat. Sous leur contrôle, chacun des époux signerait une convention de divorce, une garantie pour que l’éventuelle partie faible soit bien représentée. Cette dernière serait ensuite déposée chez un notaire, pour un coût de 50 euros et le divorce serait effectif après un délai de rétractation de 15 jours. La chancellerie insiste sur le gain de temps: on passerait de 3 à 7 mois aujourd’hui pour obtenir le divorce, à quelques semaines seulement. Néanmoins, la procédure ne pourra pas s’appliquer si un enfant mineur demande à être entendu par le juge.

Les professionnels du droit peu convaincus

L’Union syndicale des magistrats, syndicat majoritaire dans la magistrature, insiste sur le danger d’un divorce sans juge, pour les cas compliqués. « Ça va dans le sens des justiciables, à partir du moment où leur situation est simple », note Céline Parisot, porte-parole de l’USM, «Quand il n’y a pas de patrimoine, pas d’enfant, quand il n’y a rien à partager et que les deux parties sont d’accord sur le principe du divorce, pour aller plus vite, ils vont avoir recours à cette procédure avec deux avocats. Dans les situations plus complexes cela ne nous paraît pas forcément adapté ».

Le barreau de Paris émet également de vives réserves : « Le mariage n’est pas qu’un contrat », soulignent les avocats parisiens, défendant le rôle du juge qui protège la partie la plus faible, et en ce sens, ils rappellent que les enfants ne peuvent être soumis aux accords de leurs parents sans contrôle du juge.

Les avocats ajoutent « qu’au vu de la montée des intégrismes, un tel désengagement de l’Etat donne un pouvoir aux autorités religieuses alors que l’ordre public laïc ne peut être garanti que par l’autorité judiciaire. » Jacques Toubon, le défenseur des droits émet les mêmes réserves, il recommande par conséquent de réserver cette procédure aux seuls couples sans enfant ou avec enfants majeurs.

Source:rfi.fr

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