Une parade de militaires burkinabè le 1er Novembre 2013 à Ouagadougou,lors de la célébration du 53è anniversaire de l'armée nationale.

Des précisions sur les controverses relatives au Régiment de Sécurité Présidentielle(RSP) du Burkina.

Le Régiment de Sécurité Présidentielle (R.S.P.) est, à tort ou à raison, vu par l’opinion nationale, voire internationale, comme un Corps lié à un individu, surtout à « l’ancien Président, Blaise COMPAORE », pour commettre des « basses besognes ». Et certains ont travaillé et travaillent toujours à faire croire que ce Corps de Troupe n’a plus sa raison d’être dans le « nouveau Burkina Faso démocratique », où le Président intérimaire, lui-même a déjà affirmé qu’il ne se sent nullement menacé. Donnant du coup raison à ceux qui soutiennent qu’il faut dissoudre le R.S.P.
Dans un tel contexte où le faux, la rumeur, l’intoxication, etc. prennent le dessus sur la réalité et la vérité, il est nécessaire de rappeler comment et pourquoi le RSP a été créé, comment il a évolué. Il est surtout important de dire à quoi le RSP peut servir aujourd’hui dans un contexte sous-régional instable et sous diverses menaces où les autres pays prennent soin de disposer d’Unités d’élites, garantes de stabilité.

I. HISTORIQUE DU R.S.P.

Le 1er Bataillon du C.N.E.C., Centre National d’Entraînement Commando de PÔ est l’ancêtre du R.S.P. Et cela date d’avant l’arrivée de Blaise Compaoré au pouvoir. En effet, lorsque les capitaines s’emparent du pouvoir après les C.S.P. 1 &2, le C.N.E.C. est la structure de Corps de Troupe qui assure la Sécurité du Président Thomas SANKARA. Avec un système rotatif de personnels qui servent à la fois dans divers détachements sur le territoire, au Centre d’Entraînement de PÔ, au Conseil de l’entente et au Palais de Koulouba.

La donne ne change pas fondamentalement lorsqu’arrive le Président Compaoré au pouvoir en 1987. Seul changement, le gros du C.N.E.C., à Ouagadougou, est rebaptisé « Régiment de Sécurité Présidentielle » (Décret n° 95-482/PRES/DEF du 21 novembre 1995 portant création d’un Corps Spécial dénommé ‘’Régiment de Sécurité Présidentielle’’ au sein des Forces Armées). Le C.N.E.C. de PÔ est alors détaché comme entité indépendante, un corps à part chargé essentiellement de former les stagiaires commandos. Le RSP se met officiellement en place au cours de l’année 1996. Le vendredi 09 janvier 1998, une cérémonie officielle marque la remise du drapeau et l’installation du Chef de Corps.

Le R.S.P. connait une évolution successive dans son organigramme et ses missions. Un second décret vient ainsi le mettre sous l’autorité du Chef d’état-major de l’Armée de Terre, l’officier qui le commande prenant rang de Commandant de Région Militaire (Décret n°2000-326/PRES/PM/DEF du 20 juillet 2000 portant rectificatif du décret N° 95-482/PRES/DEF du 21 novembre 1995). Ainsi donc, le Régiment, son Chef sont désormais sous les ordres directs de l’Armée de Terre (et non plus seulement du Chef d’Etat-major particulier comme à sa création).

II. ORGANISATION ET MISSIONS DU R.S.P

Le Régiment de Sécurité Présidentielle est une Unité de l’Armée de terre, avec rang de Région Militaire. Il compte à ce jour environ 1.300 hommes. Presque tous fantassins et commando-parachutistes, et beaucoup de spécialistes (Transmission, Santé, Matériel, Génie, Armement, Sport, Mines et explosifs, Informatique, Administration, etc.)

La plupart des officiers et sous-officiers qui y sont affectés sont triés dès leur sortie d’école en fonction des résultats et du profil. Et tous les soldats qui ont l’honneur d’y être mutés sont d’abord tamisés, à la présentation au drapeau chaque année au Groupement d’Instruction des Forces Armées (GIFA de Bobo) : tests physiques, tri. Puis passage au CNEC de PÔ, et nouveau tri pour ne retenir que les meilleurs. Avant même de pouvoir arriver au CAMP NAABA KOOM II du R.S.P.

Les hommes du Régiment sont soumis régulièrement à des recyclages chaque semestre pour garantir leur efficacité.
Le Régiment est constitué :
-  d’un Groupement des Unités d’Intervention GUI (avec 03 Compagnies d’Intervention)
-  d’un Groupement de Commandement et des Services GCS (avec 01 Cie de Services et la Compagnie d’Appui)
-  d’un Groupement des Unités Spéciales GUS (avec 01 Groupe de Sécurité Rapprochée, GSR, 01 groupe d’Intervention Anti-terroriste GIAT et 01 Groupe de Recherche, Identification et Neutralisation des Explosifs RINEX).

Le RSP accomplit à la fois les missions ordinaires de l’Armée de terre et des missions spécifiques.
Les missions ordinaires de l’Armée de Terre :
 Assurer la défense extérieure et intérieure du territoire national en application de la doctrine d’emploi des forces armées : intégrité du territoire, souveraineté, sécurité intérieure, etc.
 Participer, conformément à la constitution, à des missions de sécurité à l’étranger dans le cadre des conventions bilatérales, multinationales ou internationales ; (participation à toutes les missions extérieures des Forces Armées Burkinabè : les bataillons Laafi au Soudan qui sont à la 7ème vague ; les bataillons Badenya qui sont à la 4ème ; les bataillons Gondaal au nord-Mali qui sont à la 1ère ; en plus des missions d’observations et participation aux PC multinationaux).
 Soutenir l’action des forces nationales de sécurité ; à savoir la Gendarmerie, la Police, la Douane, les Pompiers, les eaux et forêts, etc.
 Participer au développement socio-économique de la nation. (construction d’infrastructures, fourniture de services comme santé, transport, éducation, formation, catastrophes naturelles, protection des biens, etc.)

Les missions spécifiques du RSP : en plus des missions ordinaires précitées, accomplies dans un cadre républicain (le Président du Faso étant une institution de la République), le R.S.P. a pour missions spécifiques :
- Défendre les institutions républicaines : il reste indéniable que les risques d’instabilité liés à des changements violents de régime (coups d’états), hors le cadre normal de la Constitution, a longtemps été une source successive d’incertitudes au pays. Le Burkina a connu au bas mot une quinzaine de coups ou tentatives de coups d’états.

La stabilité sur ce plan a été, c’est indéniable, intimement liée à la qualité de la Force qui défend les institutions depuis plus de deux décennies. En coordination avec les forces de Police et de Gendarmerie qui sont déjà présentes à la Présidence (Renseignements, Honneurs, Fanfare, escorte motorisée).

- Assurer la sécurité du Chef de l’Etat, et celle de toute autre personne par lui désignée. Assurer l’escorte en véhicule, la protection rapprochée, avec capacité de lutter efficacement contre toute action terroriste.
Mission d’actualité, notamment grâce à l’unité de Sécurité Rapprochée. C’est essentiellement du personnel aguerri aux missions de protection de personnalités, formé par des assistances françaises, libyennes, marocaines, israéliennes.

Aujourd’hui, le Régiment est autonome et forme ses propres hommes depuis une quinzaine d’années. Il a aussi formé les sécurités de divers pays à leur demande et sur plusieurs vagues ces dix dernières années : Guinée Conakry, Sao Tomé, République Centrafricaine, et récemment ivoiriens. Nous pensons que ce capital géopolitique ne doit pas être perdu…

- Assurer la défense sur zone (sécurisation de périmètres, localités, installations ou infrastructures) ; le jalonnement des itinéraires sur ordre avec les Unités d’intervention du GUI et l’Unité d’Appui-feux du GCS. Avec capacité d’intervention rapide en toutes circonstances. C’est le cas lors de manifestations Nationales, sorties du Chef de l’Etat, etc.
Il est à préciser que le GFAT, Groupement de Forces de l’Armée de Terre déployé au nord Burkina au début des défaites de l’Armée malienne face aux rebelles et islamistes en 2011 était d’ossature principalement RSP avec apport d’autres unités. Hommes et armements, déployés en quelques jours seulement…

- Assurer la lutte contre le terrorisme, la criminalité, les risques liées aux risques de bombes en agglomérations, à l’aéroport, etc. avec le GIAT et le RINEX.

- Participer aux opérations anti-gang et « coup de poing », sur ordre, avec les Unités de Gendarmerie, de Police, de Douane ou des eaux et forêts.
Presque tous les officiers supérieurs actuels du Corps ont participé, avec les unités d’intervention du Corps et subordination à la Gendarmerie du Camp Paspanga, aux opérations coup de poing dans certaines provinces hautement criminogènes, particulièrement dans les années 1990. Ces missions peuvent êtres redéfinies…

Quelques anecdotes :
• Une alerte à la bombe a été donnée, suite à appel anonyme en 2004, pour un vol d’une compagnie aérienne provenant de Niamey. Le GIAT et le RINEX ont été sollicités par la sécurité aéroportuaire ; l’avion et les bagages évacués et scannés, l’avion fouillé de fond en comble par le robot et le personnel anti bombes du RSP. Aucune bombe ne fut retrouvée.

• Le RSP a aussi été sollicité le 03 février 2013 pour un colis suspect détecté lors d’un enregistrement bagages à l’aéroport de Ouagadougou. Le colis du passager Touareg suspect a été déplacé par notre robot télécommandé, puis détruit à l’écart par le même robot du RINEX.

• Une alerte d’enlèvement de deux étrangers syro-libanais ou israëliens (venus pour affaires et de passage), a été signalée par les services de Police il y a quelques années. La triangulation d’appel les plaçait aux environs du quartier Samandin. Le GIAT du RSP a intervenu toute une nuit, et les intéressés présumés victimes d’un guet-apens mafieux ont été retrouvés sains et saufs, abandonnés par les bandits.

• Il est quasi certain qu’avec la menace islamiste qui se rapproche de plus en plus (des drapeaux de Boko Haram ont été aperçus à Zinder lors des casses anti Charlie Hebdo), le R.S.P. sera fortement sollicité bientôt. On touche du bois…
• De tous les challenges de tir au pistolet automatique organisés par la coopération policière française sur les quinze dernières années (Police, Gendarmerie, RSP), seules deux n’ont pas été remportées par le Régiment, qui n’a de toutes façons jamais quitté les deux premières places.
• Le RSP a participé à l’arrêt des débordements lors des mutineries de 2011 à Bobo-Dioulasso, de concert avec d’autres forces de Défense et de Sécurité.

III. LES CHEFS DE CORPS SUCCESSIFS DU R.S.P.

Le R.S.P. a connu plusieurs chefs de Corps depuis sa création en 1995.
- Lt/Col Ousseini OUEDRAOGO (02/04/96 – 27/11/97)
- Chef de bataillon Yaya SERE (27/11/97 – 01/09/99)
- Commandant Adinaly ATOGODAN (01/09/99 – 24/04/2007)
- Lt/Col Omer BATIONO (24/04/2007 – 14/04/2011)
- Col Boureima KERE (Chef de Corps depuis le 15 avril 2011).

Quelques renseignements sur la tenue spécifique et les primes de risques.
Il est à noter que le 25ème RPC de Bobo-Dioulasso, anciennement CITAP (Centre d’instruction des Troupes Aéroportées constitue aussi une autre Unité d’élite, à effectif beaucoup plus réduit et avec d’autres missions également spécifiques). La tenue militaire du 25ème RPC est spécifique, tout comme le R.S.P. a la sienne ; les deux diffèrent de celle du reste de l’Armée de Terre. La spécification de la tenue n’est donc pas une exception R.S.P. au sein de l’Armée de terre…

En rappel, le personnel de Gendarmerie et de Police employé à la Présidence bénéficie des mêmes primes légales que le R.S.P., en plus de leurs primes spécifiques internes « primes de risque Gendarmerie ». (La garde Rouge et l’Escorte motorisée, entités de l’Escadron Escorte et d’Honneurs de la Gendarmerie). Elles ont été fixées par Décret, en même temps que les primes de feu des pompiers, de risques de la Gendarmerie, etc.

IV. L’ETAT DU R.S.P. APRES BLAISE COMPAORE

Le R.S.P., conçu pour être une force d’élite courageuse, solidaire, bien formée et régulièrement entraînée, est au service des Burkinabè pour la défense, vaille que vaille de la Patrie des Hommes intègres. Il n’est pas lié à un individu.

Les périodes qui auront fortement terni l’image du R.S.P. sont essentiellement l’affaire David Ouédraogo : kidnappé en décembre 1997 dans une maison isolée du Conseil de l’Entente, et torturé par des militaires qui s’avèreront au fil des enquête n’être que deux sous-officiers et quelques militaires du rang peu lettrés, et obéissant en cachette probablement à des ordres d’un civil, à l’insu de la hiérarchie, pour de l’argent. Lors du procès du 17 au 20 août 2000 au tribunal militaire de Ouagadougou, Marcel KAFANDO, Edmond KOAMA, Ousséni YARO, seront lourdement condamnés et deux soldats relaxés.

Puis l’autodafé odieux de Sapouy en décembre 1998, avec (presque) les mêmes suspects sérieux. Avec la suite que l’on connait.

Il a été suffisamment démontré que ces cas erratiques n’étaient pas imputables à l’ensemble de la Troupe. La quasi majorité du millier d’hommes du Régiment ont appris les deux affaires grâce à la presse, en même temps que le commun des burkinabè.

Du dehors, on pense le RSP est divisé aujourd’hui. En réalité, des hommes du rang se sont sentis inquiétés d’une dislocation inutile pour des préjugés peu argumentés.
Le mouvement d’humeur du 30 décembre semble sonner comme un élan de solidarité d’hommes et de femmes (et oui, il y a beaucoup de personnels féminins commandos), qui souhaitent être utiles en tant que structure forte, républicaine, et sans la stigmatisation de garde prétorienne au service d’un individu. Il y a déjà longtemps que ce Corps ne parle plus en termes de « COMPAORE »… La révolution des 30 et 31 octobre a touché toutes les couches socio-professionnelles.

Dans ses nombreuses revendications au Premier Ministre, Ministre de la Défense, la troupe aurait demandé entre autres la non dislocation du RSP ; la nomination du colonel-major Boureima KERE à l’état-major particulier de la Présidence et du lieutenant-colonel Céleste COULIBALY comme Chef de corps. Probablement pour leur passé intègre, leur humilité et l’ardeur au travail, mais aussi pour avoir des garanties que plus tard le gros de la troupe ne soit pas inutilement sacrifié.

Pour le Général Gilbert DIENDERE, qui n’est plus à présenter, il a été souhaité que l’on exploite ses compétences indéniables, comme conseiller par exemple ; au lieu de s’en débarrasser. Des américains auraient dit : « si vous n’en voulez plus, donnez-le nous… ». Il est l’un des rares officiers généraux de la sous-région qui maîtrise autant les questions sécuritaires dans la zone sahélo-saharienne.

Jusqu’à présent, la sécurité du Président KAFANDO et de sa famille est assurée par le même moule du RSP.

V. REFORMES EVENTUELLES DE LA STRUCTURE : QUEL AVENIR ?

La doctrine d’emploi des forces est la base essentielle de son efficacité. Une Unité comme le R.S.P., qui n’admet en son sein que du personnel physiquement apte, aguerri aux techniques commandos et parachutistes, régulièrement entraînée sera ce que le commandement voudra qu’il soit. Mais avant tout, la qualité de son personnel est une garantie de stabilité à l’intérieur du territoire qu’à nos frontières.

Il est curieux que des voix de l’extérieur du BURKINA FASO soutiennent vaille que vaille la disparition d’une unité comme le R.S.P., comme pour mieux fragiliser le BURKINA face au péril islamiste qui a conduit à la quasi banqueroute de certains Etats. Dont la qualité du personnel et le dévouement à la Nation laissait à désirer…Le piège géopolitique est clair : tuer le « chien méchant » du supposé puissant voisin, pour passer en préséance.

Le R.S.P. fut une constituante majeure du G.F.A.T., le Groupement des Forces de l’Armée de Terre, envoyé rapidement contenir nos frontières du péril islamiste en 2011. Avec du personnel organique déjà habitué à s’entraîner ensemble sur tous types d’armement. Ce même personnel a franchi la frontière malienne pour constituer avec le reste des Forces de l’Armée, le contingent de la MISMA au Mali, qui évoluera en MINUSMA.

Si de nouvelles tâches peuvent être assignées au Régiment, comme les patrouilles contre les braquages ou l’escorte de convois ou de cars, le décharger de certaines missions anciennes peut s’avérer périlleux. Rappelons-nous comment sont encore fragiles nos Etats, où de simples mouvements d’humeur dans des casernes ont entraîné des putschs ou des déstabilisations graves. Si la Guinée Bissau ou le Mali entretenaient des Unités d’élites aux missions aussi bien définies que le R.S.P., il est fort probable que les autres ne viendraient pas faire la police à l’intérieur de leurs frontières. Le Togo l’a bien compris avec son R.C.G.P. (Régiment Commando de la Garde Présidentielle) et le Niger avec son Camp Parachutiste.

Les chefs militaires actuels sont rompus aux questions de Droit, de Droit humanitaire surtout, et ont étudié dans les universités comme les autres Burkinabè d’un certain niveau intellectuel. Il faut rappeler que tous les officiers des Forces Armées passent par la case « Université » avant de finir leur formation ; quelle que soit l’Académie de formation. Et tous les stages militaires actuels tiennent fortement compte des connaissances académiques. L’emploi des Forces répond simplement à une doctrine, qui est définie par le Politique… Le RSP sera donc ce que les politiques voudront qu’il soit. En toute lucidité, en toute sérénité.

Le service de communication du RSP


 

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